Quittant son pays,
Un p'tit négro
Vint jusqu'à Paris
Voir l'exposition coloniale
C'était Nénufar
Un joyeux lascar
Pour être élégant
C'est aux pieds qu'il mettait ses gants
Refrain:
Nénufar
T'as du r'tard
mais t'es un p'tit rigolard
T'es nu comme un vers
Tu as le nez en l'air
et les ch'veux en paille de fer
Nénufar
T'as du r'tard
T'as fait la conquête des Parisiennes
T'es leur fétiche
Et tu leur portes veine !
Faut pas croire toujours
c'que Nénufar raconte
Ainsi l'autre jour
Il m'a dit
Quand je fais mes comptes
A la craie j'écris
Sur l'dos d'ma chérie
Et d'un coup d'torchon
Après j'efface les additions
Refrain
Un jour Nénufar
Entra dans une grande parfumerie
Il voulait des fards
Pour sa p'tite amie
Donnez-moi qu'il dit
Du rouge en étui
J'en veux trente kilos
Car c'est une négresse à plateaux
Refrain
...
T'as fais la conquête des Parisiennes
T'es leur fétiche
Et tu leur portes veine !
La chanson « Nénufar » chantée par Alibert ou Henri Allibert, et qui est désignée par le site « Le quai des images » comme la marche officielle de l'exposition coloniale en 1931, est entièrement stéréotypée. En effet, à cette époque, le «nègre» comme il était si péjorativement appelé, véhiculait plusieurs stéréotypes, plusieurs images négatives ou moqueuses, qui lui était attribués sans aucune distinction pour chaque individu noir. Nous pouvons le voir déjà au nom de la chanson «Nénufar» qui est le prénom du personnage. Il est ridicule d'appeler un homme Nénufar, qui est un nom ressemblant plus à un celui d'un animal domestique qu'à celui d'une personne. Aussi, la référence à l'exposition coloniale nous rappelle qu'à cette période, des Noirs étaient enfermés dans des cages comme dans un zoo, à la vue des visiteurs blancs...
Figure 1:
"Ridicule" et "pas très intelligents" étaient souvent les adjectifs que l'on attribuait aux noirs. Dans la chanson, il est dit : «Pour être élégant, c'est aux pieds qu'il mettait ses gants», «t'es nu comme un vers».
A travers Nénufar, l'auteur fait clairement comprendre que les noirs ne sont d'ordinaire pas très intelligents ni civilisés, et que de ce fait, ils ne savent pas s'habiller. Le noir est aussi souvent vu comme quelqu'un de continuellement joyeux: «t'es un p'tit rigolard».
Beaucoup de stéréotypes physiques sont aussi mis en avant dans la chanson d'Alibert. Par exemple, «Les ch'veux en paille de fer» qui fait référence aux cheveux crépus des noirs. La couleur noire de la peau est accentuée par «A la craie j'écris, sur l'dos d'ma chérie», comme si le dos en question était un tableau noir. Leur bouche est largement caricaturée : «Du rouge en étui, j'en veux trente kilos, car c'est une négresse à plateaux», dont «Trente kilos» insiste sur la grandeur des lèvres. «Une négresse à plateaux» est une image satirique, alors qu'en réalité, ce sont des femmes d'une certaine tribu qui utilisent des plateaux qu'elles mettent dans leur bouche, comme accessoires de mode, élargissant inévitablement leurs lèvres. C'est l'équivalent des bijoux des femmes occidentales.Figure 1:

A travers Nénufar, l'auteur fait clairement comprendre que les noirs ne sont d'ordinaire pas très intelligents ni civilisés, et que de ce fait, ils ne savent pas s'habiller. Le noir est aussi souvent vu comme quelqu'un de continuellement joyeux: «t'es un p'tit rigolard».
Il y a un autre stéréotype du noir, qui pourtant, pourrait être considéré comme positif. A cette époque, ils étaient fort appréciés des femmes blanches, car ils étaient connus pour être de bons amants. Cela est prouvé par la chanson : «T'as fait la conquête des Parisiennes, t'es leur fétiche et tu leur portes veine !».
D'après la chanson, les noirs, toujours représentés par Nénufar, ne seraient pas des personnes fiables, qui racontent souvent des choses inintelligentes: «Faut pas croire toujours Tout c'que Nénufar raconte».
D'après la chanson, les noirs, toujours représentés par Nénufar, ne seraient pas des personnes fiables, qui racontent souvent des choses inintelligentes: «Faut pas croire toujours Tout c'que Nénufar raconte».
En conclusion, tous les stéréotypes physique ou sociaux du noir des colonies sont réunis en une chanson. La bouche, les cheveux, la couleur de la peau, la gaieté,la nudité, la prostitution, le manque de civilisation et d'intelligence.
Figure 1 : Spectacle ethnographique à Paris en 1892
(autre exemple similaire à l'exposition coloniale en 1931)
Figure 2: "Portrait d'un jeune homme noir",
de Maurice Quentin de La Tour,
Musée des Beaux-arts d'Orléans.